Institut du Verbe incarné

« La pensée précède l’acte comme l’éclair précède le tonnerre »

Cette citation de l’écrivain allemand Heinrich Heine illustre bien ce qui se passe avec certains fondateurs de communautés religieuses se disant "nouvelles" tout en se bâtissant sur un socle idéologique antérieur.

C’est ainsi que, vers les années 1940 en France, la pensée et les écrits d’un « patriarche caché », le Père Thomas Dehau, ont servi de base pour développer une gnose sectaire, théologiquement déviant et intrinsèquement liberticide. Ses théories ont été reprises et étendues par Marie-Dominique Philippe (Fondateur de la Communauté Saint Jean), et par Thomas Philippe suivi de son disciple Jean Vanier (Fondateurs de la Communauté de l'Arche).
De même manière mais dans un registre fasciste, l’abbé Julio Meinvielle (1905-1973) prêtre argentin, qui fut l'une des figures majeures de l'antisémitisme catholique en Argentine au XXe siècle et qui influença fortement par ses écrits l'armée argentine, le Mouvement nationaliste TACUARA ainsi que la Guardia Restauradora Nacionalista, est celui qui eut un influence décisif sur du père Carlos Miguel Buela, fondateur en avril 1984 de l’Institut du Verbe Incarné.

Dans ces deux cas la perversité démontrée des disciples-fondateurs s’est donc d’abord nourrie d’une idéologie trouble qui n’a pas été suffisamment contredite. Le résultat de cette insouciance est enfin reconnu en France pour le père M.D. Philippe, son frère Thomas et pour Jean Vanier.

De même il est nécessaire d’éclairer nos lecteurs sur la genèse de cet Institut argentin du Verbe Incarné qui a commencé à s’implanter en Europe et en France notamment dans le diocèse de Toulon sans vraiment rencontrer d’obstacle.

Dans les deux cas la pensée non contrôlée a précédé les actes.
Dans les deux cas l’orage a grondé.

Racines et développement

Fondé en avril 1984 en Argentine par le père Carlos Miguel Buela (1941 - 2023)

l’Institut du Verbe Incarné (Instituto de Verbo Encarnado, IVE) a connu un fort développement avec une branche masculine initiale, une branche féminine, les « Servantes du Seigneur et de la Vierge de Matara » et un tiers-ordre. L’IVE a été accueilli en France dans le diocèse de Toulon et à Saintes. Il est aussi présent en Tunisie, en Terre Sainte, et bien entendu à Rome. Son site internet en langue française présente Carlos Buela comme un homme qui a rendu « de précieux services » dans des paroisses argentines et comme « le fondateur de plusieurs maisons dédiées aux œuvres de miséricorde ».

Abus sexuels sur des séminaristes

Buela était et est encore vraiment considéré comme « le père » dans son Institut, pourtant, dès la fin de décembre 2016 on apprenait que le Vatican le présumait coupable d’abus sexuels sur des séminaristes. Les articles parus alors aux USA dans « Crux now » et aussi en Suisse dans le site catholique « cath.ch » confirmaient ces dires tandis que le site espagnol « religiondigital.org » livrait de terribles révélations.

> Argentine : L’Eglise reconnaît des abus sexuels sur des séminaristes

> L'abus du fondateur de l'Institut du Verbe Incarné : "C'est comme avoir l'impression que ton propre père te viole"

Site en espagnol

La vérité que certains occultent, c’est que bien avant, dès juin 2010, Buela avait dû envoyer sa démission à Benoît XVI après avoir été reconnu coupable d’abus sexuels par l’évêque argentin TAUSSIG qui, comme s’il cherchait à minimiser la faute, insistait pour dire qu’il ne s’agissait pas d’abus sur mineurs. Effectivement ses victimes étaient majeurs : des séminaristes…

Un communiqué de RSF, Reporters sans Frontières, publié en 2007 relate d’autre part
> comment il avait menacé de mort, par un lourd sous-entendu, un journaliste argentin trop curieux.

En 2021 BUELA avait enfin dû se retirer, du moins officiellement, de l’Institut du Verbe Incarné et devait séjourner quelque part en Europe, en fait à Gênes en Italie avec interdiction du Vatican de reprendre contact avec sa fondation. C’est là qu’il est décédé en avril 2023. Mais c’est toujours le même problème : dès qu’un fondateur psychopathe a fait croître un fruit en y mettant un ver, même s’il est parti ou simplement tenu à distance comme c’est le cas, l’héritage subsiste et le parasite continue à prospérer et se nourrir du fruit.

Il n’est donc pas étonnant qu’en 2019 le site américain Church Militant ait dénoncé les liens de l’IVE avec Mgr Mc Carrick. « Une ancienne sœur religieuse IVE a déclaré à Church Militant en 2019 :

C'est une secte, pas un ordre religieux», et a ajouté que IVE entretenait un « lien intense » avec McCarrick. La jeune femme anonyme, qui a souffert de dépression et d'idées suicidaires à cause des abus psychologiques qu'elle a subis de la part de ses supérieurs, a quitté l'Église mais s'est finalement réconciliée. …

Après cela, McCarrick s'est rapproché de plus en plus de IVE, devenant le seul prélat de l'hémisphère occidental à ordonner les séminaristes de IVE. McCarrick, en disgrâce, a également contribué à amener IVE aux États-Unis

Après la première enquête, déjà ancienne , de Mgrs Castagna et Zecca, beaucoup de choses se sont passées. En effet, après 37 ans d’existence le « Verbo Encarnado » a nécessité pas moins que cinq interventions pontificales. Un record ! Actuellement, la congrégation serait sous le contrôle d’un commissaire pontifical, le Cardinal Santos Abril y Castelló. Un chapitre général a dû se tenir en 2016, suite à l’intervention directe du Vatican, lors duquel, selon certaines sources, les contrôleurs auraient dû eux-mêmes choisir un vicaire général et deux conseillers depuis lors installés en France, afin qu’ils leur donnent des informations sur le fonctionnement de l’IVE.

Le Père Buela condamné pour abus sexuels et comportement immoral

Ce qui est certain en tout cas c’est bien que le Père Buela avait été mis à l’écart de la charge de supérieur général depuis 2010 pour abus sexuels et comportement immoral. Il a d’abord été condamné, puis avait été confiné dans un monastère en Espagne, par Benoît XVI, avec interdiction d’entrer en contact avec un quelconque membre de l’IVE, mais certains membres de l’Institut préféraient croire qu'un saint est « calomnié » plutôt que d'admettre que le chef de leur organisation était corrompu. Comme l'a expliqué l'une des victimes, «c'est comme avoir l'impression que c'est votre propre père qui vous viole»¹. Le gouvernement général de l’IVE avait demandé au Pape François qu’il l’autorise à retourner à Gênes pour raisons d’âge et de santé. C’est donc là qu’il est décédé.

Les dénonciations de plus de vingt victimes pour abus sexuels

Les problèmes latents résultant des abus d’autorité et des actes de désobéissance envers les autorités ecclésiastiques ont toujours été les raisons des interventions de la part du Saint-Siège sur l’IVE. Ces dernières années s’y ajoutaient les dénonciations de plus de vingt victimes pour abus sexuels dont il faut rappeler que certaines étaient des enfants malentendants de l’Institut Provolo de Lujan de Cuyo. Certains membres qui ont quitté l’IVE sont très blessés à la suite de ces mauvaises expériences.

Dans la branche féminine, SSVM, abus de conscience et de pouvoir

Quant à la branche féminine, les « Servidoras del Señor y la Virgen de Matará » (en français : les Servantes du Seigneur et de la Vierge de Matara), les choses ne diffèrent pas en ce qui concerne les abus de conscience et de pouvoir, car elles sont totalement dépendantes du gouvernement de l’IVE, même si elles ont leur propre gouvernement (leur propre supérieure générale). Mais cela ne signifie pas grand-chose car elles dépendent du conseil et de la formation de la branche masculine ; tout ce qui concerne les décisions, fondations et apostolats doit être décidé en entente avec le gouvernement général de l’IVE. C’est de là que surgissent les problèmes.

« S’il y a des abus d’autorité et de conscience dans la branche masculine, il y en aura aussi dans la branche féminine, je l’ai expérimenté », déclare à l’AVREF une survivante que nous appellerons Albertina.

Albertina nous a écrit aussi :

« J’ai quitté de manière forcée les « Servidoras » ( les Servantes), j’ai subi des pressions pour que je parte. Ceci m’est de plus en plus évident ! D’abord, j’ai pensé rester et résoudre les problèmes avec la CIVCSVA ² et contacter l’évêque local, mais je ne supportais plus la pression psychologique, et je savais qu’ils n’allaient pas me donner d’argent pour faire les trajets nécessaires pour résoudre les problèmes, ils n’allaient pas non plus me donner la permission d’écrire à la CIVCSVA (parce qu’ils m’avaient déjà interdit l’usage du téléphone ou bien ils surveillaient mes appels, ils m’avaient aussi interdit l’usage de l’ordinateur).

Je leur avais dit que je parlerais à l’évêque, alors ils me menacèrent que si je le faisais ils m’emmèneraient à un monastère. J’ai eu très peur ! Je prenais des médicaments pour dormir puis j’ai cessé d’en prendre car je craignais qu’ils m’envoient à un autre endroit contre ma volonté ou qu’ils me retirent mes passeports. »

Derrière les faits relatés par Albertina il y a les statistiques, qui sont très difficiles à nier selon religiondigital.org et c'est celle de 450 prêtres qui ont été ordonnés dans le IVE : la moitié ont quitté la congrégation et, parmi eux la moitié ont directement quitté le ministère (c’est à dire ont cessé d'exercer le sacerdoce).

"Beaucoup d'entre eux ont été victimes d'abus de la part du père Buela", ont-ils assuré.

Pour les motifs évoqués ci-dessus l"AVREF conseille d'éviter ces deux communautés, l'IVE comme la SSVM.

¹Ceci nous renvoie au livre d’Olivier BOBINEAU :
> Le sacré incestueux, les prêtres pédophiles, également recommandé dans notre sélection.

²La CIVCSVA est la Congrégation du Vatican pour les Instituts de Vie Consacrée et les Sociétés de Vie Apostolique.