L'AVREF PROPOSE

En avril 219 que l’AVREF diffusait ce document intitulé « l’AVREF PROPOSE ». 

Nous  reprenions l’ensemble de ces suggestions  résultant de nos  nombreuses expériences et des témoignages reçus de victimes qui nous faisaient dire : « On aurait pu l’éviter si… ». Et nous énumérions un certain nombre de dispositions nécessaires pour prévenir et guérir les abus et dérives constatés dans de nombreuses communautés religieuses. Il ne s’agissait pas de hautes considérations théologiques, mais au contraire de mesures simples qui, comme l’on dit de façon populaire, « tombent sous le sens », de remarques tirées de l’examen des erreurs à éviter, mais aussi, et fort heureusement, de ce que l’on appelle « les bonnes pratiques ».


Nous sommes heureux de constater que le rapport de la CIASE a depuis lors créé un choc salutaire car nous retrouvons dans le document de préconisations de la CORREF (Conférence des Religieux et Religieuses de France) en date du 20 mars 2023 un certain nombre de règles de bonnes pratiques similaires à celles que nous demandions quatre années plus tôt. Les idées font donc leur chemin.

La CORREF préconise  …

Le point important, c’est que les prises de conscience progressent, que les dénis de réalité sont en recul. C’est pourquoi nous mettons à votre disposition ce document de préconisations que vous pourrez télécharger.

> Télécharger  « CORREF - PRÉCONISATIONS ET RÈGLES DE BONNES PRATIQUES » en PDF 

 
Il s’agit d’un document de travail. Il n’est donc pas définitif, mais c’est ainsi que des solutions seront trouvées ,que les victimes peuvent libérer leur parole et protéger les plus jeunes.  Vous qui nous lisez, vous pouvez aussi y contribuer en nous faisant part de vos réflexions. Appelez nous ou écrivez nous à : contact@avref.fr .


Dispositions nécessaires pour prévenir et soigner les dérives sectaires
 ou abus dans la vie consacrée


«Nous devons soigner les blessures. Ensuite nous pourrons parler de tout le reste. Soigner les blessures, soigner les blessures… 
Et il faut commencer par le bas.»
Pape François, extrait de l’entretien accordé au père Antonio Spadaro, La CiviltàCattolica, 19.09.2013


«Nous voulons prendre les mesures nécessaires en vue d’une meilleure prévention des abus. Pour réaliser cet objectif, nous avons opté pour une approche globale et «intégrée».
Extrait du document Une souffrance cachée publié par les Evêques et Supérieurs majeurs de Belgique, janvier 2012


«…offrir des propositions et des initiatives destinées à améliorer les normes et les procédures pour la protection de tous les mineurs et des adultes vulnérables.»
Pape François, lettre du 2 février 2015 aux présidents des Conférences épiscopales


AVANÇONS

Il nous a paru nécessaire de coordonner par le moyen d'un document mis en commun, l'énergie des uns et des autres, acteurs dans l'effort pour aider les victimes des dérives dans les mouvements religieux et pour remédier à ces douloureuses problématiques. C'est sur le sujet catholique que nous nous sommes arrêtés, puisque c'est l'endroit d'expertise de l'AVREF, et que chaque situation demande de la précision et d'être évaluée et réglée dans son contexte. Mais la réflexion est partagée avec les associations généralistes sur les faits sectaires. Et nous avons mis à contribution anciens membres de communautés, médecins, ecclésiastiques, juristes.

Ce document est une étape qui peut paraître nouvelle, et qui serait pleinement réussie lorsque les différentes parties, Institution comprise, communiqueront ouvertement sur ce qui y est discuté.

En effet, la longue histoire d'accompagnement des victimes donne aux associations d'aide une forte expertise sur les processus déviants, et, dans notre cas, une connaissance intime. Intime, parce que d'anciens membres ont rejoint l'association, et apportent leur connaissance irremplaçable.
 
Le mal est inscrit dans des structures, des systèmes, des fonctionnements, il a fait son sillon dans les chairs. Il a même tué. Ou détruit ce qui fait se tenir une personne.
Il vaudrait la peine d'en tracer l'historique, d'en chercher les racines dans l'Institution elle-même. Ceci serait un acte de courage certainement salutaire. Mais qui renvoie à un chantier très vaste et qui appartient à l'Institution.
Le plus proche, et qui peut réunir tout le monde, est de résoudre les situations actuelles avec les moyens dont on dispose.
 
Nous sommes toujours étonnés, dans les cas que nous suivons, de constater que les enquêtes canoniques n'aboutissent souvent qu'à maintenir les responsables en place, sauf un chef qu'on sacrifie, lequel souvent continue son influence en secret.
Nous savons la difficulté des discernements.

La gestion d'une communauté déviante est intrinsèquement pervertie, et elle sait se donner toutes les apparences de la normalité. Elle sait mimer son moule. Elle pervertit ses propres membres.

Il faut cesser de laisser une si grande autonomie aux communautés, eussent-elles toutes les apparences de la santé. Il est de la responsabilité de l'autorité ecclésiale, à ses différents échelons, d'exercer sa vigilance continue. Qu'elle revendique son autonomie est légitime, même dans la gestion de ces crises (quoique bien souvent le pénal soit requis). Mais si nous avons à gérer les victimes, nous sommes bien obligés de questionner le contexte et d'entrer dans un dialogue précis et ouvert avec les responsables d'une Institution qui héberge ou qui est atteinte par ces dérives.
 
Il nous a donc semblé qu'en décrivant les dérives depuis l'entrée du postulant (ou de la postulante) jusqu'à son éventuelle sortie, nous pouvions indiquer dans la meilleure précision les parades accessibles et repérer des déficiences dans la gestion des crises.

Des abus systématiques (au regard du droit : civil, pénal, mais aussi canonique) se trouvent dans nombre de communautés dites nouvelles, mais sont aussi repérables dans des plus anciennes, dans des îlots de congrégations classiques, abbayes, prieurés, ce qui renvoie à des pièges récurrents dans l'Histoire, mais qui ont aujourd'hui ces visages nouveaux : dérives aux configurations systématiques, abouties, comme scientifiques, quelquefois mondialisées, et qu'il est temps de décrypter et de combattre ensemble.

Le mot communauté que nous employons de façon générique est impropre en bien des cas, mais nous sommes obligés de nous tenir à une terminologie. Il concerne dans nos propos des réalités aussi diverses que des congrégations, des fraternités, des associations diocésaines, des prélatures, des « mouvements », des instituts réguliers, séculiers… et proprement des communautés religieuses.
Il s'agit donc de tant d'institutions qui se définissent dans une unité de charisme ou dans une vie communautaire, avec leurs statuts propres, leur (a-) territorialité, leurs labels canoniques. Elles ne sont pas toutes religieuses au sens strict, et même peuvent s'en démarquer, intégrant des laïcs (c'est-à-dire des non-religieux) ou se revendiquant même de la laïcité. Mais on observe un décalque dans les processus d'engagement, quelles que soient les dénominations. Parler d'engagement définitif au célibat, de célibat apostolique, de vie consacrée, de vœux, par exemple, c'est parler d'obligations et de processus comparables.
 
C'est ainsi que nous utiliserons le lexique des communautés religieuses au sens strict, mais l'on saura faire pour chaque cas les parallèles. Des développements sur le cas d'engagements à vie de personnes mariées en ce qui touche leurs spécificités seront faits ultérieurement.
 
Puissions-nous maintenant mieux avancer, en société, sur ces problèmes de société.
 
 
Aymeri Suarez-Pazos.
Président de l'AVREF.

Première PARTIE : dispositions préventives

Section I : Le suivi des étapes des étapes de la vie consacrée

Préliminaire : Nécessaire renforcement de la distinction entre laïcat et vie religieuse

Aujourd'hui, une confusion est entretenue par nombre de communautés entre certaines formes d'états laïcs et une vie religieuse, voire entre certains engagements laïcs non consacrés et vie consacrée. La prononciation de vœux privés, voire de pseudo-vœux, des cérémonies a-canoniques, qui sont présentés aux concernés comme d'implication équivalente à celle des vœux publics d'une vie consacrée; des vies de célibat apostolique copiées dans leurs fonctionnement sur les vies consacrées; des vies communautaires intégrant des laïcs, voire des familles; des confusions même sur la signification des vœux (le champ de l'obéissance, une vision erronée de la chasteté, une pauvreté qui ruine les personnes et leurs familles mais enrichit la structure...); tout cela fait un dommage considérable.

En un temps où l'on a fait des progrès essentiels pour prendre conscience de la grandeur de la vocation des laïcs, de telles confusions ne peuvent être qu'intentionnelles.

Ainsi faut-il aussi bien préserver l'état de vie consacrée dans son sens et sa dignité, ce en quoi il respecte la dignité humaine, et l'état de vie laïque, à l'opposé d'un esprit ni d'un mode de vie clérical.

RECRUTEMENT ET PERIODES PROBATOIRES

On aura toujours à l'esprit que d'après le droit de l’Église, "tous les fidèles jouissent du droit de n'être soumis à aucune contrainte dans le choix d’un état de vie » (CIC, canon 219)1 . 1  [CIC : Codex iuris canonici, autrement dit Code de droit canonique.]

On remarque, sur le point du recrutement « vocationnel », une grande dérive prosélyte. Le souci excessif d'expansion de la communauté se fait au détriment de l'écoute des personnes et prend le pas sur la maturation d'un projet de vie personnel et authentique.

Les paragraphes qui suivent développent dans le détail des points essentiels à contrôler.

Communication d’appel à la vie consacrée

Cette communication passe de plus en plus par Internet. Pour rester « vraie » elle se doit d’éviter les méthodes du marketing destiné à la consommation aussi bien que de la propagande organisée en préalable à une emprise psychologique.

Ainsi on ne peut tolérer l'utilisation pour  « appâter »ou recruter des « codes » à la mode parmi la jeunesse, qu’il s’agisse de codes vestimentaires, de pratique de sports qu’ils soient extrêmes ou non, de loisirs collectifs déterminés par les origines sociales. Ces choses n'ont rien à voir avec ce qui est convoqué dans une vocation au don total de soi tel que pratiqué dans ces mouvements.
Eviter d’aggraver l’opposition risquant de surgir entre adolescents, entre les jeunes et leurs parents en pratiquant une lecture littérale non contextualisée de textes des Evangiles qui annoncent la division dans les familles, ce qui reviendrait à adopter une attitude fondamentaliste.
De même les prédicateurs de retraites dites d’orientation doivent faire preuve de retenue en s’abstenant d’enseigner aux jeunes de façon anticipée les réponses à fournir aux objections que les parents ne manqueront pas de leur faire s’ils s’engagent prématurément dans une vie consacrée.
Eviter toute mise en scène idyllique de la vie consacrée parmi une population toujours jeune, toujours souriante, toujours bien nourrie et en bonne santé, dans une nature toujours ensoleillée et verdoyante, parmi des personnes toujours épanouies parce qu’elles bénéficient de l’aide de la communauté.
Cette présentation "jeuniste" pose de plus la spiritualité comme fait générationnel. On ne s'étonne pas qu'on dise ensuite aux nouveaux entrés : "vos parents ne peuvent vous comprendre, notre vocation est trop originale et neuve."

La communication sur Internet doit rester sobre : c’est une communication et non une publicité. Elle informe. Elle se garde de harponner. C'est le respect de ce qu'on prétend promouvoir, mais aussi des personnes à qui on ne peut voler la générosité, les rêves, les enthousiasmes.

Dans le même esprit l’appel à s’engager dans une mission humanitaire et/ou évangélisatrice via une ONG affiliée à la communauté ne doit pas reprendre les clichés et images révolus d’une époque où les nations européennes colonisaient une grande part du monde et étaient censées lui apporter la santé, la civilisation et le développement intégral.

Recrutement

Il arrive fréquemment que des communautés incitent leurs jeunes recrues à interrompre leurs études, les rendant ainsi inaptes à un retour à la vie active.

Les communautés et mouvements doivent donc s’interdire de recruter des jeunes qui n’ont pas achevé la formation dans laquelle ils sont engagés. Les communautés doivent s’engager à les laisser acquérir avant l’entrée une qualification professionnelle reconnue (diplôme + première expérience professionnelle), de sorte qu’ils aient la possibilité de revenir à la vie civile dans les meilleures conditions si la vie religieuse ou si le laïcat consacré ne leur convient pas. Ainsi ils ne se trouveront pas piégés. La communauté ne pourra que tirer profit de cette stratégie : ils pourront y développer leurs talents.
 
Les communautés et mouvements ne doivent pas recruter des personnes atteintes d’une maladie ou d’un handicap qui les empêcherait d’avoir un discernement personnel et une décision libre. Ils se renseigneront avec soin sur le passé judiciaire de ceux qu’ils reçoivent et demanderont un extrait de casier judiciaire avant tout engagement définitif.

Postulat, noviciat

Pendant les périodes où les jeunes sont regardants, postulants ou novices, les communautés et mouvements ne doivent pas leur demander l’état de leur patrimoine personnel ni de renoncer à leurs biens (compte bancaire ; livret d’épargne) ni à leurs relations (ne pas clore l’adresse Internet, ne pas résilier la ligne téléphonique), ni à des échanges avec des personnes de sexe opposé.

Il convient de respecter strictement la règle selon laquelle le noviciat ne doit pas excéder deux ans (CIC, c. 648 § «), l’éventuelle prolongation de six mois devant demeurer une exception et n’est pas extensible au-delà de ce délai (CIC, c.653 § 2). Pendant cette période la communauté doit cotiser pour la retraite (à la CAVIMAC en France). Si le (ou la) novice constate que ce n’est pas fait, son intérêt est de quitter tout de suite un Institut ou une Congrégation qui ne respecte pas les engagements ecclésiaux.

Durant toutes ces périodes la maturité des postulants doit être éprouvée, notamment dans la liberté du dialogue avec les supérieurs.

Famille

Un discernement sain se fait hors de toute pression familiale autant que communautaire.

Les communautés se donnent trop souvent le privilège de la pression et écartent tout rôle de la famille dans le discernement. Sauf famille complètement acquise, ce qui n'aide pas mieux un discernement équilibré, elles s'imposent comme la nouvelle et unique famille, coupant le postulant de sa famille biologique.

L’atteinte de la majorité légale à 18 ans ne doit pas, bien au contraire, remettre en cause ce principe qui fait des familles les partenaires privilégiés de la vie consacrée de leurs membres.

Relations aux proches

Droit à téléphoner, à communiquer par courrier, Internet ou SMS : Le novice ou postulant a le droit de téléphoner à ses proches (famille, amis) sans être écouté ou espionné, et à la fréquence qu'il souhaite. Ce droit doit pouvoir être exercé au moins une fois par semaine et même une fois par jour lorsqu’il est entré depuis moins d’un mois. Il a le droit de communiquer par courrier, par Internet, SMS et de façon générale au moins une fois par semaine et de façon générale accéder à tout moyen électronique de communication en toute confidentialité. Il doit disposer d’une adresse de messagerie privée même si l’ordinateur est partagé par plusieurs utilisateurs. Les proches ont le droit de lui téléphoner à des heures qui peuvent être définies à l’avance dans les mêmes conditions de confidentialité et de périodicité. Ils peuvent également communiquer avec lui par courrier, par Internet ou par SMS.

Port de l’habit religieux

Durant la période de discernement, et jusqu’au noviciat, le port de l’habit religieux devrait être proscrit, pour éviter le conditionnement par l'anticipation de l'engagement. Dans la même logique, l’habit du novice devrait être distinct de celui de la personne engagée par des vœux. Le renouvellement régulier des effets civils doit pouvoir s’effectuer.

Règlement des situations ambiguës

Au moment où paraît ce document nous héritons de situations ambiguës concernant des laïcs dits "consacrés", qui doivent mener une vie religieuse et communautaire, mais qui n’en restent pas moins des laïcs avec les droits et devoirs afférents à leur état. Pour ces personnes il convient que le statut social soit clairement défini conformément au droit du travail en vigueur dans le pays où ils se trouvent.

Sur ce point on note avec intérêt le souci de l’Eglise de France de se doter d’une Convention Collective pour le personnel qu’elle emploie. Il conviendra que cette convention prenne en compte le statut des personnels de service employés dans les sanctuaires, centres de pèlerinage, de retraite et de façon générale tous établissements conçus pour l’accueil, l’hébergement et la restauration des fidèles.

Sur la base de la grille conventionnelle et des enquêtes ACEMO2 des solutions innovantes doivent être trouvées. Il en est de même pour un certain nombre de cas individuels mal réglés jusqu’à ce jour. 

[2] Les enquêtes trimestrielles de l’INSEE français (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques) pour le compte du Ministère du Travail sur l’Activité et les Conditions d’Emploi de la Main d’œuvre (ACEMO) sont un indicateur intéressant. La branche 3206 (Eglise) présente les statuts 5017 du Personnel de l’Eglise de France et Associés présentés par catégorie socio-professionnelle, filière, niveau et coefficient.

LES VŒUX ET ENGAGEMENTS A VIE


Le point des vœux est très délicat. S'ils reposent sur des traditions ancestrales, les vœux dans les formes d'engagement actuels, souvent nouveaux, seraient, comme nous l'avons dit dans le préliminaire, à harmoniser et bien définir. Nous précisons ici des règles nécessaires pour éviter la confusion chez la personne qui s'engage et lui permettre d'avancer avec certitude. Outre des vœux sans valeurs canoniques chez certaines communautés, d'autres proposent des engagements de vie pour des laïcs qui entretiennent les mêmes confusions.

Aussi ce que nous présentons sous la dénomination des vœux s'applique-t-il à toute forme d'engagement à vie.

Il est nécessaire de préciser, comme on le verra pour la sortie éventuelle, qu'un engagement s'inscrit dans une procédure canonique, objectivée par des documents signés et enregistrés dont puisse disposer la personne.

Les vœux ne sont valides qu’après un noviciat structuré et réellement formateur et quand le novice est en bonne santé. S’il est atteint d’une maladie chronique ou d’une incapacité permanente, il convient d’en apprécier avec lui les conséquences car cela ne représente pas nécessairement un obstacle aux vœux. La règle canonique exigeant que le noviciat ne dépasse pas deux années doit être rappelée et réellement appliquée.

Si, à l’issue de cette période, la personne qui était novice n’est pas admise aux vœux, elle doit quitter la communauté et ne pas y prolonger son séjour dans l’espoir d’être admise ultérieurement.

De même si à l’issue des vœux temporaires, on lui refuse l’accès aux vœux définitifs. Les situations d’attente incertaine doivent être proscrites.

S’il est demandé une lettre écrite de candidature au postulant, la communauté doit également lui adresser une réponse écrite à laquelle doivent être jointes les Constitutions, et les informations pratiques utiles en matière de formation, de santé et prévoyance, et de respect des règles du pays où il se trouve (droit du Travail notamment, titres de séjour).

Il faut s’assurer que toute personne qui prononce des vœux a bien lu les Constitutions de la communauté ainsi que ces informations, et a pris le temps de se les faire expliquer et commenter. Un document co-signé par l’intéressé(e) et le (ou la) Supérieur(e) doit en attester et être enregistré auprès d’une instance ecclésiale indépendante. Si ce n’est pas le cas il doit être clairement reconnu qu’il y a eu dol et que les vœux sont nuls (CIC, c. 1191).
Une rencontre préalable à l'engagement serait rendue obligatoire entre le postulant et cette instance indépendante et compétente sur les dérives.

Les vœux ou engagements sans publicité, et qui souvent sont reçus dans le secret de quelques supérieurs, ne mènent pas à une vie religieuse consacrée ni à un engagement canonique à vie. Cela doit être clair pour les intéressés qui sont la plupart du temps de jeunes adultes mal informés. Il s’agit au mieux d’un engagement privé dont ils peuvent facilement se délier.

Les autorités ecclésiales doivent rappeler à l’ordre les communautés qui entretiennent une ambiguïté permanente en pratiquant des vœux ou des engagements semi-publics qui ne correspondent à rien.

LES ASPECTS PATRIMONIAUX

Les communautés ont tendance à beaucoup solliciter financièrement leurs membres, les proches, voire le monde entier.

Les appels aux dons, les procédés de défiscalisation, les pressions pour obtenir de l'argent de la part des familles et la dépossession complète des membres constituent de graves dérives qui peuvent les rendre riches à millions.

3.1 Protection des membres

En ce qui concerne les membres, la première disposition touche à leur fortune. Le procédé si fréquent consistant à faire signer un testament en faveur de la communauté dès l’entrée dans une communauté, ou dès la prise de vœux temporaires doit être banni.

Le testateur doit avoir sa propre copie de l'acte.

Si une personne consacrée touche un héritage, elle doit rester libre de décider de son affectation en consultant librement son notaire et ses proches sans être accompagnée, pour éviter toute pression.

Si elle quitte la communauté elle doit récupérer son héritage et, quand il y a eu dot, son montant, ou une partie évaluée prorata temporis, en fonction de la durée de présence dans la communauté et de l'espérance de vie.

3.2 Protection des familles

Ce ne sont pas les membres qui doivent solliciter les familles. Cela constitue un chantage affectif. Les moyens de communication des communautés pour la recherche de fonds sont suffisamment développés.

LE COURS DE LA VIE CONSACREE

Nous abordons ici la vie quotidienne de la personne engagée dans tous ses aspects. Un engagement, même définitif, ne signifie pas la privation d'une liberté fondamentale.
Sur ce point, un chantage systématique au « salut » est opposé à toute remise en question de l'engagement. Poser un tabou sur cette remise en question et vouloir la tuer dans son œuf, c'est enlever précisément sa valeur à l'engagement en privant l'individu de son libre arbitre. Le don d'une personne est libre dans le temps. On rencontre à cet endroit les termes absolus de « mort », « salut »...

Information et transparence

Les communautés et mouvements doivent rendre public (a fortiori laisser aux postulants, novices et membres consacrés ainsi qu’à leurs proches) un libre accès, dans un lieu ouvert, aux Règles et Constitutions ainsi qu’à l’ensemble des documents permettant de comprendre l’organisation, la gestion financière, les règles d’hygiène et sécurité de l’Établissement, la protection sociale, le régime de retraite du pays (CAVIMAC en France, AVS en Suisse, etc.) et de façon générale les procédures qui règlent la vie communautaire.

Tous, et en particulier les plus jeunes d’entre eux, doivent être incités et aidés à comprendre la signification pratique de ces textes ; un religieux expérimenté sera responsable du respect de cette exigence. L’organigramme du mouvement ou de la communauté avec le « qui fait quoi » doit être porté à leur connaissance.
La liberté d’en référer à une autorité supérieure ou extérieure en cas de conflit avec l’autorité immédiate doit être garantie. Il faut donc définir une telle autorité extérieure et les modalités de sa saisine.

En cas d’envoi à l’étranger pour mission de longue durée (plus de 6 mois) ou transfert durable, le régime social de l’expatriation doit entrer en vigueur avec toutes les garanties nécessaires, les familles doivent être prévenues avec un délai de prévenance de trois mois.

Santé physique et psychique

Très souvent, on observe dans le champ de la santé, l'utilisation de pratiques douteuses, alternatives ou intrusives dans la relation avec le médecin.
Doit-on préciser aussi que le champ du psychique n'est pas de l'ordre du spirituel ?

Ni la santé psychique ni la santé physique ne sont de la compétence de la direction spirituelle.
La santé psychique particulièrement ne peut être prise en charge par un professionnel attaché à la communauté.
Les communautés doivent garantir aux membres le libre choix d’un médecin ou professionnel de santé en tenant à leur disposition l’annuaire local des médecins inscrits à l’Ordre (en France) , généralistes, spécialistes de la santé physique et mentale, paramédicaux et en leur donnant la liberté de prendre tout rendez-vous qu’ils jugent bon. Comme dans la vie professionnelle, une visite médicale annuelle de contrôle effectuée auprès d’un Cabinet médical indépendant devrait être instituée. Il s’agit d’un minimum. Les consultations médicales se feront en tête à tête avec le médecin, en dehors de la présence d’un tiers, quel qu’il soit. Les responsables de la communauté seront respectueux du secret médical et professionnel en s’abstenant de toute question auprès du professionnel de santé.
Les Supérieurs ou des membres de la communauté désignés par eux ne devront pas accompagner la personne dans le cabinet du médecin, encore moins prendre de décision à sa place.

A la suite de la consultation médicale, la prescription médicale sera remise directement au malade. Elle doit être observée de façon scrupuleuse, en ce qui concerne la nature des médicaments prescrits, leur mode d’administration, la durée du traitement, ainsi que les examens complémentaires demandés.

Aucun responsable de communauté, même s’il possède un diplôme d’aide-soignant ou d’infirmier, ne peut s’arroger le droit d’administrer à un membre de la communauté un médicament qui ne peut être délivré que sur ordonnance, en dehors d’une prescription médicale. Il engage gravement sa responsabilité en faisant un tel acte qui constitue un exercice illégal de la médecine et peut entraîner des poursuites pénales (code de la santé publique français, articles L4161-1 à L 4161-6) .

Le malade restera en possession de ses médicaments et sera laissé responsable du suivi de son traitement. S’il reste des médicaments à la fin du traitement prescrit par le médecin, ils seront détruits et ne seront en aucun cas conservés, et encore moins administrés à un autre membre de la communauté.

Par ailleurs, la communauté peut disposer d’une armoire à pharmacie contenant des médicaments en vente libre. On en vérifiera soigneusement les dates de péremption et l’on n’achètera aucun médicament sur internet, sauf sur les sites autorisés (En France : voir la liste sur le site www.ordre.pharmacien.fr). On les proposera à bon escient aux membres de la communauté, qui resteront toujours libres de les prendre ou non. Ils pourront aussi prendre l’initiative de les demander.

Ils doivent également respecter le choix effectué librement par le membre de la communauté, s’il réside en France, de la personne de confiance habilitée à traiter de sa situation avec le corps médical lors de circonstances extrêmes (article 1111-6 du code de la santé publique français).4 [4] Tous les codes peuvent être consultés sur le site https://www.legifrance.gouv.fr/

En cas d’état de santé physique ou mental très grave, la communauté doit impérativement prévenir la famille et les proches et, s’il s’agit de la France, respecter le code de la santé publique qui précise dans son article R4127-36 :

« Si le malade est hors d'état d'exprimer sa volonté, le médecin ne peut intervenir sans que ses proches aient été prévenus et informés, sauf urgence ou impossibilité ».

Santé spirituelle

Le choix doit être également ouvert et libre pour un directeur de conscience et un confesseur qui peut très bien appartenir à une autre communauté. Il sera proscrit de se confesser au fondateur ou prieur de la communauté car ils exercent un ascendant sur le for externe ; le choix peut se faire sur un confesseur de la communauté n’exerçant pas l’autorité religieuse ou l’exerçant en dehors de celle-ci. Il faut exclure toute culpabilisation du recours à un confesseur extérieur.

Cette protection du for interne doit faire l’objet d’une information systématique, vérifiée par des autorités externes au mouvement ou à la communauté.

Ce qui est divulgué à un tiers du for interne sous forme d’écoute relève de la confidence ou du secret de confession.

Hors confession, la confidence ne peut être révélée sans consentement mutuel : Cela relèverait d’une faute grave pour l’écoutant ayant ainsi rompu la confiance que l’on lui avait portée.

Quant au secret de la confession, on se rappellera la rigueur de l’Eglise à ce sujet :

  « Le confesseur qui viole directement le secret sacramentel encourt l’excommunication latae sententiae réservée au Siège Apostolique »
(CIC, c. 1388 § 1).


Très souvent, l'obligation du secret de confession est contournée par la violation du secret de confidence. La confidence est instituée auprès de laïcs autant que de prêtres confesseurs. Un engagement de la communauté doit être précisé aux membres sur le respect de ce secret.

La communication avec les proches (famille, amis)

Elle doit être maintenue à un rythme convenu, dans des conditions raisonnables de périodicité et de confidentialité quels que soient les moyens utilisés : visite, parloir, courrier, téléphone, messagerie électronique, téléconférence (« Skype »). Les courriers ne seront pas ouverts, ni à l’arrivée ni au départ.

Les séjours dans d'autres pays

La vie consacrée se déroulant de plus en plus avec des missions et séjours de longue durée dans d’autres pays que le pays d’origine de la personne, il convient que les cotisations sociales (santé et prévoyance) soient maintenues avec des statuts définis d’expatriation et que des assurances rapatriement soient prises en prévision d’accident ou de maladie grave dans le pays étranger. L’intéressé(e) doit être informé(e) de ces dispositions et recevoir en mains propres sa carte d’assuré pour pouvoir en disposer en permanence.


Evénements familiaux

L’autorisation de se rendre à des événements familiaux importants : baptêmes, mariages, inhumations, … doit être donnée et même favorisée. Si la Règle ou les Constitutions, écrites à une époque où prédominait un certain jansénisme, limitent cette possibilité, la communauté se doit d’accorder sur ces sujets les indults6 répondant aux usages du monde contemporain.

[6]indult : Faveur accordée qui dispense du droit commun de l’Eglise

Vacances et retraite

La communauté ne doit pas entraver le droit au repos parmi ses proches et familiers, quelques semaines dans l’année.
Dans les faits, les séjours chez les parents sont trop souvent accordés au compte-gouttes, quelquefois réduits à une visite biannuelle, elle-même très courte et gênée par une communication continue de la personne avec la communauté.

Vie civique

Etant personnes civiques, tous les membres d’une communauté doivent satisfaire aux devoirs que cela implique. Ils doivent pouvoir librement consulter la presse et accéder à l’information (Internet, ...). Ils doivent pouvoir se faire leur propre opinion sur les événements nationaux et mondiaux. La communauté doit leur faciliter en cas d’élection ou de consultation publique l’accès au bureau de vote et la liberté de décision en leur âme et conscience. S’ils sont dans un pays étranger ils doivent être encouragés à s’inscrire au consulat de leur pays d’origine.

Il est rappelé que la liberté spirituelle n’annule pas les devoirs civiques ni l’autonomie dans l’exercice de ces devoirs. En corollaire de ce principe toute gestion par la communauté de tout ou partie de ces devoirs et droits afférents est un abus. Ces choses ne relèvent pas de sa juridiction.

L’OBLIGATION DE FORMATION

« Tout au long de leur vie, les religieux poursuivront avec soin leur formation spirituelle, doctrinale et pratique, et les supérieurs leur en fourniront les moyens et le temps nécessaire » (CIC, c. 661).

Cette obligation a été reprise dans plusieurs directives pontificales et notamment de l’exhortation
« vitaconsacrata ». Elle a été réactualisée le 29.11.2013 par le pape François s’adressant aux Supérieurs d’Ordres masculins. La formation continue est valable tout au long de la vie et pas seulement durant le noviciat, "jusqu’au dernier souffle" comme l’affirme le Cardinal Braz de Aviz
dans La Croix du 04.12.2015 . http://www.la-croix.com/Religion/Actualite/ENTRETIEN-Cardinal-Joao-Braz-de-Aviz-On-doit-se-sentir-au-monastere-comme-dans-une-famille-2015-12-04-1388849


Il est important de noter qu’une formation exclusivement interne au mouvement ou à l’institution ne peut qu’être problématique, prêtant au danger de formatage et à toutes sortes de carences. On observe que souvent les institutions qui monopolisent la formation s’affranchissent de fondamentaux et sont tributaires de l’enseignement du fondateur, de ses déficiences du point de vue philosophique, théologique, voire ecclésiologique. La visée d’une telle formation, qui, pour s’inscrire dans la tradition catholique, peut se donner les apparences de la plus stricte orthodoxie, est de donner des réponses toute faites (qui satisfont l’institution), lesquelles peuvent rassurer des esprits inquiets mais n’aident pas et n’accompagnent pas une authentique croissance spirituelle ni humaine.

Il est donc important, si la formation n’est pas publique, de considérer qu’elle ne peut être réservée à des enseignants "maison". Le contenu de l’enseignement ne peut être privatisé, dès lors qu’il s’inscrit dans le corpus ecclésial. La vigilance repose sur l’Eglise qui par ses reconnaissances donne son seing à ces formations.

Formation intellectuelle et professionnelle

Tous les moyens seront mis à disposition pour parfaire cette formation et, autant que de besoin, acquérir des titres et diplômes reconnus dans des Universités catholiques ou laïques, Ecoles et organismes de formation agréés. Il va de soi que les études engagées avant l’entrée dans la communauté doivent être menées à leur terme logique avant l’engagement dans la vie consacrée. Si la volonté du postulant était de les interrompre, la communauté devrait au contraire l’inciter à les mener jusqu’à leur terme. Ce que l'on observe, c’est le contraire : quantité de communautés convainquent des jeunes d’interrompre leur parcours universitaire ou diplômant pour répondre immédiatement à l’urgence de l’appel vocationnel.

Formation communautaire

Un processus d’intégration à la vie communautaire doit être mis en place selon diverses formules (tutorat, etc.). En outre le travail de groupe est en complément des tâches individuelles effectuées isolément, car il fait partie de l’apprentissage communautaire.

Formation spirituelle 

Un soin particulier doit être donné à une formation élargie. En aucun cas cette formation ne doit être limitée aux seuls écrits du fondateur de la communauté. Elle doit comporter obligatoirement une ouverture vers la pensée et la spiritualité d’autres communautés et d’autres auteurs.

 

Formation apostolique

C’est un souhait du Pape François. Elle implique nécessairement une ouverture vers l’extérieur, vers le monde actuel et ses réalités, même et surtout si les personnes consacrées sont cloîtrées.

Il est à noter un point de vigilance. On peut penser qu'il est inutile d'insister sur cette formation apostolique. Or si toute communauté se réclame de l’apostolat, certaines abusent de cette notion au profit d’un prosélytisme agressif tel que celui stigmatisé par le pape François dans ses entretiens d’août 2013 avec le père Spadaro publiés dans la revue jésuite "Etudes" en octobre de la même année.

La formation apostolique ne signifie donc pas apprendre et appliquer les schémas d’apostolat du mouvement, mais entrer en intelligence avec le monde dans la visée d’un dialogue. L’absence d’écoute du monde est contre-productive à une fin d’apostolat. La formation apostolique ne peut se réduire à une méthodologie fondée sur l’idée de production de vocations, mimétique d’un esprit industriel et de concurrence. Elle n'est pas prosélytisme. Et elle ne peut réduire le monde extérieur à des comportements schématiques.

La formation apostolique devra donc se mettre à jour sur les directives de l’Eglise en ce sens.
C'est dire aussi que la réduction de la dimension « apostolique » au seul prosélytisme est la manifestation d'un manque flagrant d'unité au corps entier de l'Eglise à laquelle la communauté est censée appartenir et avec laquelle elle doit s'harmoniser.

Mais comment espérer une telle formation quand la personne membre n’a pas elle-même été respectée dans le processus de maturation de sa vocation ?

Formation des responsables

De solides connaissances en droit canonique ou en théologie ne sont pas suffisantes pour exercer la fonction de responsable à différents niveaux dans une communauté. Diverses actions judiciaires et plaintes récemment déposées démontrent la nécessité d’une formation renforcée destinée aux responsables que ce soit en matière économique, juridique ainsi qu’en sciences du comportement. Il devra s’agir de principes simples, mais fondamentaux constituant un corpus de connaissances indispensables. Le responsable doit déléguer à d'autres compétences en fonction des besoins.

En matière juridique et de gestion

Respect des règles civiles, sociales, commerciales, fiscales et administratives, des contrats passés, de la circulaire La Martinière7 et des limites de son champ d’application ; ([7] Circulaire La Martinière : Circulaire de la Direction Générale des Impôts française en date du 7 janvier 1966, du nom d'un haut fonctionnaire. Elle a pour objet : "la situation fiscale des membres du clergé catholique", c'est à dire des membres du clergé séculier, des religieux et des religieuses. Elle régit ainsi depuis 50 ans un régime fiscal avantageux pour l'Eglise de France, à condition que soient respectées certaines règles bien précises.)

Respect des principes du droit des associations, du droit social (les critères du contrat de travail, les cotisations obligatoires, les règles d’expatriation), du droit civil et de la définition des responsabilités, des règles de séjour des étrangers, du droit pénal (abus de faiblesse, protection de la jeunesse, pédophilie...), du droit de la santé (secret médical, liberté de choix du médecin, information des proches, limites des médecines alternatives); 


En matière de sciences du comportement

De façon générale on s’attachera à améliorer les capacités de discernement des personnalités. Les sujets abordés seront : les règles de l’entretien, de l’accompagnement, les personnalités difficiles, les personnalités fragiles, la dépression, les dérives sectaires et l’emprise mentale, les thérapies douteuses qui se mettent sous couvert de méthodologies à la mode, fussent-elles ou non scientifiques (Ennéagramme, etc.).
 
Formation des formateursUne formation intercommunautaire des formateurs nous paraît le meilleur moyen d’éviter qu’une communauté ne se constitue en groupe isolé. Elle doit tenir compte des évolutions et des réalités du monde moderne, des progrès des sciences de l’éducation et de l’information, des avancées constatées dans l’Exégèse et les sciences bibliques. Elle ne doit en aucune façon être confiée à un seul Groupe.
 
Pour être fructueuse, elle doit permettre aux différents mouvements et sensibilités de s’exprimer dans des sessions appropriées.
 
On peut se poser la question de l'ancrage dans la formation diocésaine. Il serait en effet utile que soit mise en place une formation dans les diocèses à laquelle seraient tenus de participer les formateurs des communautés.

LE DEPART DE LA VIE CONSACREE

La procédure de sortie fait généralement l'objet d'une demande écrite, mais systématiquement, la dispense (voire l'éviction) sont formulées oralement. Faute de preuve de son entrée et de sa sortie, la personne ne peut justifier aucunement de son engagement antérieur.

L'église ignorante du contrat moral ne lui accorde de fait aucune valeur : une personne engagée au célibat au sein d'une telle communauté pourra se marier religieusement sans justifier de sa sortie.
Dans le cas d'une éviction, la décision est brutale, unilatérale et laisse la personne désemparée.

Si un engagement doit s'inscrire dans une procédure canonique, objectivée par des documents signés et enregistrés dont puisse disposer la personne, la sortie doit faire l'objet d'une procédure symétrique.

Ces documents doivent faire l'objet d'un enregistrement par l'Eglise hiérarchique.

Ainsi l'Eglise hiérarchique devient responsable de la gestion de sortie. Elle pourra définir les prises en charge et aides à la réinsertion, ce qui relève de la communauté et ce qui relève de dispositifs qu'elle mettra en place.
 
La détresse des sortants est spirituelle, psychologique et matérielle.
 
La détresse spirituelle, jamais prise en charge, doit être soignée séparément de la communauté d'origine, de sorte que la personne puisse être accompagnée dans sa nouvelle étape de discernement en dehors de toute emprise.
Nous relevons que la détresse psychologique est polluée par la détresse spirituelle qui bloque l'efficacité de l'intervention d'un praticien.
 
Un service de médiation tiers pourrait être mis en place par l'église hiérarchique pour évaluer les suites psychologiques et matérielles de la sortie.  
 
Quant aux suites psychologiques et médicales, la communauté, selon l'évaluation du service médiateur, prendra en charge les honoraires du praticien librement choisi par la personne sortante.
 
Quand le départ est dû à un abus, quelle qu’en soit la nature (harcèlement, abus physique, emprise mentale, dérive sectaire...), ce service pourra proposer un processus de réparation à la victime :  reconnaissance des faits, demande de pardon personnalisée effectuée par l’abuseur ou son représentant. Cette réparation ne doit pas empêcher celui qui s’estime victime de ces abus d’intenter, s’il le souhaite, une action devant les tribunaux.
 
Si le départ a pris la forme d’une fuite subite, seul moyen d’échapper à l’emprise, les comportements souvent constatés de relance téléphonique, de chantages divers ou de harcèlement visant à faire réintégrer le mouvement ou la communauté doivent être bannis. L'instance de médiation rétablit le contact avec l'Eglise universelle et garantit le respect de la vie privée des ex-membres.
 
Sur le plan matériel, il est impératif de rechercher des outils facilitant l’orientation, l’insertion dans la vie active, le logement, etc.
Les documents (tels que certificats de travail, bulletins de salaire, permis de conduire, pièces d'identité...) et effets personnels doivent être restitués sans délai.
 
Le service de médiation imposera à la communauté une aide financière adaptée selon des formules souples (pécule, prêt, caution, etc.) tenant compte de chaque cas individuel. Dans le cas du départ d’un ordre cloîtré ou portant un habit des vêtements civils au goût du jour en quantité et qualité suffisantes doivent être fournis.
Nous observons que les communautés déviantes s'exonèrent facilement de toute responsabilité matérielle. Ce n'est donc pas à elles d'en faire l'évaluation.
 
Si la situation a créé une incapacité permanente partielle, par exemple une inaptitude au travail, celle-ci doit être indemnisée sous forme de rente.
 
Quelle que soit la nature ou la cause du départ, les trimestres (en France) ouvrant des droits à la retraite doivent être cotisés et mis à jour.

SECTION II : LA GOUVERNANCE

D’origine religieuse, l’expression populaire « tenir chapitre » indique depuis les temps anciens le souci d’une gouvernance collégiale associant les membres d’une communauté et tenant compte de l’expression de leurs avis avant toute prise de décision importante. Il suffit de rappeler ce principe consultatif à ceux qui sont trop tentés de personnaliser un pouvoir qui ne vient pas d’eux.

Ceci étant posé nous développons dans cette section quelques points-clé touchant la gouvernance sur lesquels des dysfonctionnements répétés nous ont été signalés.

QUELQUES DISTINCTIONS ELEMENTAIRES

On observe de plus en plus de communautés mêlant prêtres, religieux, laïcs, célibataires, personnes mariées, voire couples9 avec ou sans enfants. Ces situations sont très souvent au détriment du respect de chaque statut ou entité. [9] On prendra soin à ce que des couples membres d’une communauté ne dépendent pas d’une direction spirituelle d’un religieux de ladite communauté. Les risques d’intrusion dans l’intimité de la vie du ménage sont en effet trop flagrants et la protection du for intérieur risque en permanence d’être remise en cause.


Il semble désormais qu'existe une interdiction romaine de communauté résidentielle mêlant divers états de vie et qu'aient été précisées des modalités de gouvernement séparé.
Néanmoins la survivance des confusions de gouvernement nous oblige à évoquer la nature et la permanence de déviances.
Ne serait-ce pas logiquement à une femme ou à une équipe de femmes qu’il reviendrait de diriger une communauté de femmes ? Une forme pernicieuse de gouvernement par les hommes (la symétrique est plus rare, mais existe) se fait lorsque les responsables des sections féminines sont sous la coupe d'une direction générale masculine.
Comment préserver l’esprit laïc si les laïcs doivent obéissance à des clercs ?
Comment s’assurer du respect de leur autonomie quant à leur activité professionnelle, sociale, etc. ? On observe que systématiquement ils sont fortement "conseillés" quant à ces activités, et très souvent empêchés de toute activité sociale qui ne regarde pas la communauté.
Comment respecter un choix de célibat dans une vie commune avec des couples et des familles ?
Comment admettre que des religieux soient gouvernés par des laïcs, fussent-ils consacrés ?

Autant de questions qui sont essentielles et qui imposent que ces situations soient résolues dans le respect de chaque type de vocation.

QUELQUES RAPPELS ELEMENTAIRES

Les lois fiscales et sociales des pays où est présente la communauté doivent être respectées

S’agissant de personnes consacrées ayant effectué leur noviciat ou leurs premiers temps de services dans un pays européen, les dispositifs de droits communs relatifs à l’expatriation doivent être appliqués s’ils sont envoyés hors des pays de l’Union européenne. Des assurances complémentaires doivent être prises pour le cas d’accident grave ou de rapatriement urgent.

Lors d’un transfert géographique les droits acquis dans un pays doivent être transférés et suivre la personne. L’intéressé doit se voir remettre personnellement les relevés des différents organismes sociaux qui le concernent.

Sur le territoire français la circulaire La Martinière du 7 janvier 1966 déterminant la situation fiscale des membres du clergé catholique, des congrégations et communautés et des associations, établissements et entreprises qui utilisent le concours de clercs doit être rigoureusement respectée.

  « Les clercs visés dans cette note s'entendent des membres du clergé séculier, des religieux et religieuses » (Introduction). Les laïcs dits « consacrés » ou membres de tiers-ordres ne sont donc pas concernés et, comme tels, doivent être employés et salariés conformément au régime de droit commun.

Aucune communauté n’est au-dessus des lois pénales des pays concernés


Il convient de rappeler que la non-dénonciation d'un crime est un délit dans tous les pays. Dans le droit français ce délit est passible de trois ans d’emprisonnement (article 434-1 du code pénal).

Cette règle pénale doit être connue des Supérieurs ou responsables de communautés qui, prenant connaissance de comportements délictueux de certains de leurs membres, auraient tendance à les couvrir au lieu de les dénoncer à la police ou au procureur de la République (en France). Dans ce cas le souci de protéger coûte que coûte l’image de l’Institution en masquant la réalité est un comportement irresponsable. De même tout membre d’une communauté témoin d’abus doit faire tout son possible pour les dénoncer et, s’il arrive à se libérer de son état de soumission, même, s’il le faut, en désobéissant à sa hiérarchie 

LE SYSTEME D’ALERTE

La vigilance sur une communauté ne peut se faire de la part de la hiérarchie ecclésiale dans le seul dialogue avec les responsables. Il est établi qu’il est inconséquent de se priver de l’écoute des victimes et du lien avec les associations d’aide aux victimes.


La confiance entre les associations et les services d’Église repose sur une communication réciproque de données objectives (dispositifs ou actions en cours).

Il paraît essentiel de mettre en place en commun un système d’alerte, avec affichage des indicateurs sur les différentes communautés. Un tel système, alimenté par les plaintes reçues, permettra au Service ecclésial compétent d'être plus performant10 , et aux associations de mieux informer et conseiller. Tout cela garantissant l'autonomie de chacun. [10] On estime que pour une plainte, 9 cas sont étouffés. Parmi des raisons : la honte du qu’en-dira-t-on, un sentiment de culpabilité, un mécanisme de fuite comme le déni de réalité, un état dépressif, la peur de représailles de la part de la communauté d’origine, les pressions que celle-ci exerce - quelquefois au moyen d’avocats à leur solde, ou encore un mécanisme d’emprise qui se maintient parfois pendant plusieurs années après la sortie.

AUDIT ET VISITES DE CONTROLE

Il existe des procédures d'enquêtes ou de contrôles internes à l’Église comme il en existe dans toute institution. Et les principes qui les fondent sont certainement clairs et structurés.

Devant le panorama de déviances qui se présente à nous, il est évident que se pose la question de l'efficacité de ces contrôles. Il ne s'agit pas pour nous de juger de procédures qui ne nous sont que partiellement connues, mais de définir ce qui pourrait remédier à ce dysfonctionnement institutionnel.

En effet, nous traitons ici de déviances structurelles qui reposent sur des phénomènes d'emprise et de manipulation. Il est possible que les techniques institutionnelles de manipulation ne soient pas repérées par l'autorité.

Il s'agit d'abord de comprendre la nature de la déviance structurelle. Il s'agit d'une déviance perverse. Elle peut donc passer inaperçue.

Le mode opératoire de la déviance perverse est mimétique : on utilise le langage institutionnel dans ce qu'il a de propre. Ainsi de la spiritualité, des traditions des vœux, des pratiques de guérison, de méditation, etc. Ces façons de présenter les pratiques et la spiritualité propres du mouvement peuvent empêcher l'enquêteur d'y voir un vice.

Ce mode opératoire s'appuie aussi sur les faiblesses institutionnelles, joue sur les peurs et sur les intérêts. Concrètement, la conscience d'une crise majeure traversée par l'Institution dans le monde moderne, fait que l'autorité, loin de refréner les mouvements déviants, aura tendance à les favoriser. Ils lui proposent avec facilité de retrouver des vocations, de l'argent, une communication maîtrisée, le pouvoir.

Ce qu'il faut pointer, c'est donc d'abord le risque de connivence de l'autorité ecclésiale dans la gestion de ce dossier complexe et douloureux. L'autorité qui missionne un enquêteur doit vouloir repérer les déviances.

Il faut donc se poser la question de l'impartialité. Comment, par exemple, se satisfaire qu'un évêque intéressé à une communauté dans son diocèse soit chargé de l'enquête ?

Il y a aussi des dispositions prises lorsque les déviances sont avérées, qui semblent un parti pris pour que rien ne change, avec l'alibi de la prudence et le masque de la naïveté.

Comment, par exemple, concevoir qu'on maintienne en place les dirigeants d'une communauté déviante, comme s'ils étaient capables soudainement de se sortir eux-mêmes du carcan de leur fonctionnement et d'un système d'emprise dont ils ont été des rouages essentiels ?

Ceci étant dit, il nous semble important d'établir des règles élémentaires qui garantissent la neutralité de l'enquête et intègrent la psychologie déviante, d'une part, et la psychologie de la personne sous emprise, d'autre part.

Les trois pôles

Quand un audit est décidé, son champ d’investigation devrait être organisé en trois pôles :

• Les structures
• Les procédures
• Les comportements

Doit-on rappeler qu’une enquête ne questionnant que les membres actuels, lesquels sont coordonnés par leur hiérarchie, est déficiente et n’obtiendra que le son de cloche des supérieurs ? Il faut interroger individuellement, et en lieu neutre, chaque membre, mais aussi les proches, le personnel, etc., en créant les conditions pour que la parole soit libre et spontanée.

Une enquête prend son temps et peut nécessiter plusieurs auditions d'une personne, tenant compte du processus de libération de la parole.

Pour aider à cette liberté de parole, il est bon de libérer les consciences de la tutelle du mouvement, en leur rappelant leur devoir de s'en remettre à l'autorité supérieure de l’Église, ainsi que le définit le droit canonique (canons 1531 §1, 1532, 1561 §2, 628 §3...). En général, les mouvements déviants citent systématiquement l'autorité de l’Église pour asseoir leur autorité propre.

Principe de précaution

Dès lors qu’une enquête canonique est décidée auprès d’une communauté, le principe de précaution doit être appliqué consistant à bloquer pendant la période préalable à l’enquête et ce jusqu’à la remise des conclusions finales, tout recrutement de postulant, de novice, toute prise de vœux temporaire ou définitive et tout envoi en mission humanitaire ou évangélisatrice, bref toute initiative ou mesure visant à intégrer de nouvelles personnes ou à renforcer l’appartenance à la communauté de celles qui y sont déjà présentes, ainsi que toute publicité de recrutement par voie directe ou par l’intermédiaire des médias.

Quelques critères de discernement

Si le nombre de personnes prononçant des vœux est sensiblement égal à celui des personnes entrées en noviciat, cela signifie qu’il y a eu emprise initiale et que le discernement n’a pas été sérieusement effectué. Ce sera source de problèmes ultérieurs.


Il faut considérer l’isolement dans lequel on met les personnes, accru par l’expatriation ou les délocalisations fréquentes. Lorsqu’une communauté déplace ses membres trop souvent, il y a un indice de déstabilisation et de fragilisation de la personne à fin d’emprise.
Il est bon de s'intéresser tant à la situation patrimoniale qu'au mode de gestion des flux financiers. Lorsque l'organisation juridique, comptable et fiduciaire n'est pas transparente, ou qu'elle fait apparaître des sociétés écrans, des associations, des fondations ou établissements off shore, ou tous procédés et montages qui, pour légaux qu'ils puissent être, sont propres à dispenser la communauté d'un compte-rendu de gestion responsable, "sincère et véritable" selon l'expression usuelle des Cabinets spécialisés, alors l'indice de dérive est très clair.

Dans une communauté où des cas de dépression, de suicides ou d’hospitalisation en milieu psychiatrique ont été recensés, les enquêteurs auront intérêt à vérifier l’existence d’une pharmacie dite « centrale ». La découverte dans cette pharmacie de neuroleptiques, d’anxiolytiques, d’antidépresseurs, et autres médicaments psychotropes sera un bon indicateur de l’état psychique des membres de la communauté et des dérives en matière de prescription médicamenteuse, surtout si les responsables ne peuvent fournir les ordonnances médicales correspondantes.
Lorsque lors des enquêtes le discours des membres est trop concordant, univoque, ne manifeste aucune critique, qu’aucune crise personnelle ni structurelle ne s’avoue, l’indice est évident.

Principes de publicité et de surveillance


Les résultats d’une enquête canonique doivent être publiés si l'on ne veut pas continuer le déni aussi bien dans la communauté que dans sa communication. Les enquêteurs déposeront leur rapport à l'autorité qui les en a chargés, laquelle diffusera aux membres individuellement, lesquels en accuseront réception. Sur ce point comme sur les autres, on ne peut évidemment se suffire de faire confiance à la communauté déviante.
Ce rapport devrait être enregistré dans le Registre des Communautés Religieuses et Laïques recommandé plus loin (chap. 5.1).

Ensuite, périodiquement, et au moins une fois par an pendant les cinq années qui suivent, il appartiendra aux enquêteurs de vérifier l’application effective de leurs recommandations par des contrôles annoncés ou par surprise. Si ce n’est pas le cas, des recommandations complémentaires doivent être publiées avec un rappel à l’ordre. Si le rappel à l’ordre s’avère inefficace, les enquêteurs doivent disposer d’une autorité déléguée suffisante pour prendre des mesures conservatoires.

VERS UNE TRANSPARENCE DES INSTITUTIONS, DE LEURS FINANCEMENTS, DES RECOURS.


L'engagement dans les communautés religieuses se fait sur fond de spiritualité. Sont évacuées les problématiques financières (sinon par les engagements radicaux de pauvreté ou de dons financiers) et institutionnelles.
Ceci profite à une opacité de fait dans l'organisation institutionnelle et financière du mouvement, et dans sa relation avec l’Église elle-même et les institutions civiles.
Nous touchons ici au point névralgique de leur pouvoir abusif.

La transparence financière
Des comptes de résultats annuels doivent être établis et diffusés aux membres. La certification par un professionnel est vivement recommandée.
L’organigramme de l’équipe dirigeante doit être communiqué et aisément consultable par tous à toutes les étapes : regardant, postulant, novice, membre, …
La structure de l’organisation doit être transparente (ex : ACUT11 par rapport à OPUS DEI) faisant apparaître avec les liens juridiques, financiers ou personnels tous les organismes affiliés ou associés de diverses façons à la maison-mère : associations, fondations destinées à collecter des fonds, sociétés civiles immobilières, mouvements de jeunes, sites Internet, médias, coopératives, centres de formation, etc. [11] ACUT : Association Culturelle Universitaire et Technique (société liée à l'Opus Dei en France)

Les comptes rendus des diverses réunions internes doivent être publiés.
La Règle et les Constitutions12 doivent être largement diffusées dans la communauté. [12] Les "Constitutions" sont les textes qui réglementent l'organisation et les missions de la communauté. Elles présentent une certaine analogie avec le "règlement intérieur" dans une Entreprise industrielle et commerciale. Les "constitutions" sont une charte, une règle de vie. Elles peuvent être complétées par un "Directoire". On nomme ainsi un recueil de règles pratiques relatives à la vie quotidienne dans la communauté. On ne peut que regretter que la définition de ces termes soit méconnue des pratiquants et que le contenu de ces documents soit divulgué avec parcimonie. Nous considérons comme une manœuvre dolosive le fait d'accepter l'engagement d'une personne dans la vie consacrée sans lui avoir permis de prendre connaissance de ces documents et de se les faire expliquer. Dans des institutions au mode de fonctionnement analogue, mais dites laïques, on aura d’autres dénominations : instructions, catéchismes etc., dont l’accès n’est ouvert qu’aux responsables de l’institution.

L’ensemble de ces informations est consultable en libre accès dans un lieu de passage fréquent, une bibliothèque, ou un centre de documentation interne.

Vers une publication centralisée et un organe de surveillance.

Il nous semble important que soit établi un registre équivalent au registre du commerce et des sociétés, centralisant l'ensemble des informations, et dans lequel seront déposés les statuts, publiée l'identité des organes dirigeants, déposés les comptes annuels, publiées les décisions d'Assemblée Générale.
Appelons pour la suite ce registre le Registre des Communautés Religieuses et Laïques.

Le cas particulier des ONG

Différents mouvements humanitaires et ONG sont affiliés à des mouvements ecclésiaux. Les projets foisonnent et sont rarement évalués selon un processus défini. Il convient d’appliquer à ces ONG des référentiels aujourd’hui largement diffusés, par exemple la norme IE001/10 qui détermine les règles de transparence, de cohérence, définit les responsabilités et permet un contrôle des ressources et des pratiques d’organismes faisant appel à la générosité du public, mais aussi la norme ISO 26000 applicable de façon plus large à la responsabilité sociétale de l’ONG, et pouvant englober également la norme ISO 9001 qui concerne la qualité.

Il est indispensable que les familles et donateurs puissent s’assurer que ces normes et référentiels sont appliqués à l’ensemble du personnel et contrôlés par des organismes agréés avant de financer un jeune venant juste d’atteindre sa majorité s’engager avec toute sa générosité dans un projet à l’étranger.

Il faut un statut au jeune en mission autre que celui de bénévole, qui n'en est pas un.

Nous avons connaissance de situations où les missions proposées ne sont pas remboursées aux donateurs lorsqu'elles sont remplacées par des missions à coût moindre.

Il doit donc y avoir des modalités précises sur le remboursement du donateur en cas de modification du projet.

Un système reconnu - la question de la reconnaissance

Les mouvements ou communautés sont à la recherche de reconnaissances canoniques pour asseoir leur légitimité. Les évêques, premiers à délivrer de tels agréments, n'ont pas, même s'ils en avaient la volonté, la possibilité de tout contrôler.

Il paraît bien nécessaire que la reconnaissance soit systématiquement effectuée de manière collégiale, avec une relecture croisée des statuts, des directoires et des constitutions dont le contenu parfois discutable pourrait ainsi être amendé.
Ces dispositions sont mises en œuvre dans certains diocèses, mais dans d'autres, non.

Il est essentiel que l'évêque se renseigne sur la communauté qui vient s'implanter chez lui depuis un autre diocèse.

Certaines communautés, certains instituts obtiennent par la suite une reconnaissance de droit pontifical. Leur but, en se targuant du fait qu’elles sont "reconnues par Rome", ou "reconnues par le Pape", est souvent, en plus d’une ouverture à l’internationalisation, d’échapper à l’autorité de l’épiscopat local. Et l’on comprend aisément que ce n’est pas au niveau du Vatican ou de la Curie qu’un contrôle peut être exercé sur ce qui se passe à l’échelon régional. De même on comprend aisément qu’en cas d’abus ou de dysfonctionnement faisant l’objet d’une plainte, les délais de réponse sont beaucoup trop longs.

Il en est de même des prélatures personnelles du Pape qui n’a évidemment pas la possibilité de s’en occuper.

Face à ces situations, les laïcs et associations de victimes doivent pouvoir soutenir leurs évêques pour qu’ils interviennent énergiquement au niveau du Vatican et de la Curie et obtiennent une délégation de pouvoir, notamment disciplinaire, sur la représentation locale de ces communautés et instituts pontificaux. La réalité actuelle est que l'évêque répond par son impuissance.

D’autre part, dans un premier temps, devant l’étendue et la problématique du phénomène, l’arrêt de toute nouvelle reconnaissance de type pontifical est une mesure conservatoire qui s’impose en attendant que cette procédure canonique héritée de l’histoire soit remise à plat.

Enfin, quand un responsable est condamné par un Tribunal ecclésiastique local, l’épiscopat local doit bénéficier de toute latitude pour, au moins, le suspendre de ses fonctions en attendant la réponse de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, cette mesure conservatoire étant destinée à stopper tout nouvel abus éventuel pendant le déroulement de la procédure au niveau romain.

Les exemples montrent qu’il est salutaire qu’une telle condamnation soit publiée, et l’on ne peut admettre que l’exemple d’un responsable condamné continue d’être défendu et proclamé par sa communauté. Nous ne pouvons pas ne pas citer en exemple la communauté Points-Cœur, qui maintient un déni dans le monde (en Amérique du Sud particulièrement) sur les condamnations dont a fait objet son fondateur. Malgré la mise à l’écart officielle de celui-ci, elle continue une propagande active dans tous les diocèses de France, en évacuant ces problèmes.

L’ECOUTE DES FAMILLES

Il arrive fréquemment que la victime ne parte pas parce qu’elle est sous emprise, qu’elle ne sait où aller ou parce qu’elle connaît des troubles psychologiques renforçant son état de dépendance. Dans ce cas l’écoute des victimes indirectes que sont les familles est primordiale. Les refus de rendez-vous dans les évêchés ne doivent plus exister.

Les familles et/ou les proches doivent être considérés a priori comme étant de bonne foi, a priori comme ne cherchant pas à faire obstacle à la vocation de l’être cher, a priori comme étant bien informés ou conscients d’une situation qui échappe à d’autres. Une réponse doit leur être apportée. Ce dialogue est nécessaire, même hors cas d’abus effectifs, pour les familles réfractaires au fait religieux tel qu’il se manifeste dans la vie communautaire. Les associations peuvent par ailleurs les aider à distinguer.

En cas d’abus, la souffrance des familles et des proches doit être reconnue, respectée. Des efforts doivent être faits au niveau ecclésial pour la soulager, surtout quand l’abus a provoqué un dégât irréversible : rupture du lien familial, suicide, hospitalisation en milieu psychiatrique, etc.

Tout courrier adressé par un proche de la personne consacrée signalant une dérive doit faire l’objet d’un accusé de réception, et d’une réponse écrite et doit rester confidentiel vis-à-vis de la communauté. On assiste à des situations de crises entre le membre d'une communauté et sa famille par le fait que l'autorité a transmis aux supérieurs la plainte ou la lettre. Le témoignage ou la plainte doit être considéré a priori comme étant recevable et doit déclencher, selon une procédure d’urgence, une enquête appropriée menée par des personnes indépendantes.

DEUXIEME PARTIE : dispositions réparatrices

Section I : Les cas critiques

LES SUICIDES

Ce problème particulièrement sensible nécessite un traitement spécifique.

L’enquête obligatoire

Tout suicide enregistré (ou tentative connue pendant ou après la vie en communauté) est un indicateur d’alerte suffisamment grave pour déclencher immédiatement une inspection ou enquête, afin de comprendre les raisons du suicide et de prendre les mesures d’urgence destinées à empêcher la propagation du phénomène.

Le recueil et l’analyse des données

Nous demandons d’autre part une large collecte d’informations sur ce sujet, qu’elles soient de nature psychologique, médicale, juridique ou autre. L’analyse de cas enregistrés menée de façon indépendante doit nous amener à mettre en place un observatoire de ce phénomène ainsi qu’un programme de prévention. Il est obligatoire de recourir à chaque fois à la pratique de la méthode d’autopsie psychologique préconisée en France par l’INSERM13.[13] INSERM : Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale.Cf. article de Catherine PETITNICOLAS, le Figaro, 18.03.2005 et et Matthieu ECOIFFER, Libération, à la même date.
http://www.inserm.fr/thematiques/sante-publique/dossiers-d-information/suicide-autopsie-psychologique-et-prevention

LES HOSPITALISATIONS EN MILIEU PSYCHIATRIQUE, LES INTERVENTIONS MEDICALES URGENTES


Dans le même ordre d’idées toute hospitalisation en milieu psychiatrique à la demande d'un tiers doit être signalée aux proches et nécessite un traitement particulier sur lequel une commission ad hoc doit se pencher et faire des propositions. Il en est de même pour toute hospitalisation prolongée.

Toute décision d’intervention chirurgicale est soumise à certaines règles strictes définies dans le Code de la Santé Publique en France et dans les différentes législations des pays voisins. Notamment l’information du patient doit être garantie ainsi que son libre choix quand cela est possible. Il est bon que les responsables des communautés en soient conscients. Nous citons à cet effet quelques articles du Code français.

-          Rappel de la règle du consentement libre et éclairé :

Article L.1111-4 du CSP14 [14] CSP : Code de Santé Publique (France)

« Aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne et ce consentement peut être retiré à tout moment.»
Dans le cas d’un refus de soins de la part du patient, le médecin, soumis à son devoir d’assistance, doit informer le patient des conséquences de son refus, des bénignes au plus graves.

Article R.4127-36 du CSP

« Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas. Lorsque le malade, en état d'exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le médecin doit respecter ce refus après avoir informé le malade de ses conséquences.»

-          Nécessité de désigner une personne de confiance :
Article L.1111-4 du CSP

« Lorsque la personne est hors d'état d'exprimer sa volonté, aucune intervention ou investigation ne peut être réalisée, sauf urgence ou impossibilité, sans que la personne de confiance prévue à l'article L. 1111-6, ou la famille, ou à défaut, un de ses proches ait été consulté.»

 Le représentant est soit la personne de confiance, soit, à défaut, un proche. Il importe donc que la désignation de cette personne soit faite dès l’entrée dans la communauté, et précisée avant toute expatriation.


Les dépressions

Pour l’ensemble des communautés problématiques sur lesquelles nous sommes requis, les victimes attestent du nombre préoccupant de cas dépressifs parmi les membres, voire de problèmes psychiques difficiles. Les consultations de spécialistes doivent être déterminées par la personne concernée et non pas la communauté : trop de spécialistes sont imposés par la hiérarchie avec qui ils sont en connivence, quand la communauté n’empêche pas elle-même toute forme de consultation. Ceci est tout particulièrement délicat dans le cas du suivi psychologique ou psychiatrique : il faut un médecin indépendant consulté par la personne seule.

Section II : Le droit à l’objection de conscience

La reconnaissance du droit à l’objection de conscience des personnes est nécessaire.
Or le système d'emprise mis en place par les communautés déviantes enlève tout libre-arbitre, en faisant de l'esprit critique envers les directeurs et leurs décisions une faute grave et « diabolique ».
 
Rappelant que « la lettre tue » et que « l’esprit vivifie », nous demandons que soit reconnu vis-à-vis des dispositions du droit canonique, ou plutôt que soit ajouté à ces dispositions, un droit à l’objection de conscience des personnes consacrées, et par suite aux personnes engagées sur ce modèle.
 
En effet, les canons 212 §2 & §3, et 618, seuls à garantir aux fidèles un espace d'expression vis à vis des « Pasteurs de l'Eglise », voire de signifier leur devoir de prévenir de problèmes éventuels pour le bien de l'Eglise, laissent pourtant entière l'obligation d'obéissance.
Le canon 212 §3 exige « le savoir, la compétence et le prestige » à celui qui s'exprime. Et le canon 618, qui oblige l'écoute des « Supérieurs », leur recommande cependant de « promouvoir [l’]obéissance volontaire [du sujet] dans le respect de la personne humaine », et leur donne le dernier mot : « restant sauve cependant leur autorité de décider et d'ordonner ce qu'il y a à faire ».
On retrouve dans une telle formulation les « privations de la liberté en toute liberté » qui assoient l'emprise sur les adeptes.
 
Dans le cas d'abus repéré, une personne peut et doit aussi, le cas échéant s’adresser directement aux autorités civiles. C’est ce qu’exprime Marie Collins :

« Si les cas d’abus sont avérés et que la victime y consent, il faut arriver à la dénonciation aux autorités civiles ou pénales.»15

[15] Extrait de : Conférence Episcopale Italienne, Lignes directrices pour les cas d’abus sexuels contre des mineurs de la part du clergé, 2014

Section III : L’aide à la fuite

Il est des cas où la seule façon de quitter une communauté, pour la victime, consiste à s’enfuir, à partir sans prévenir.
 
En effet en cas d’abus caractérisé, qu’il soit physique mais aussi psychologique, la victime obéit à une impulsion du moment qui est le résultat d’une suite de « déclics » qui l’ont amenée à prendre sa décision. Dans ce cas la fuite est la seule façon de quitter la communauté. Tout avertissement préalable adressé à l’abuseur bloque en effet cette issue et la menace d’apostasie associée à la diabolisation du monde extérieur accentue l’effet bloquant. Sans compter les stratégies qui seront mises en place pour conditionner affectivement un retour sur sa décision.
 
Par conséquent il se peut très bien que cette fuite s’effectue sans papiers d’identité (car ils ne sont pas accessibles), sans argent, sans effets personnels, voire même sans adresse précise où se rendre. En d’autres termes le « fuyard » d’une communauté abusive peut très bien se retrouver dans la situation d’un(e) SDF puisqu’il (elle) n’a pas eu la possibilité de partir au terme d’un échange serein et qu’il (elle) a dû s’échapper sans attirer l’attention. Pour éviter une situation aussi redoutable certaines personnes restent présentes contre leur gré dans des communautés. Elles y sont en quelque sorte otages.
 
Le caractère critique de cette situation est encore aggravé pour les personnes qui n’ont pas la nationalité française et sont déracinées car natives de pays en voie de développement.
 
Une attention particulière doit être accordée à leur cas en relation, par exemple, avec la CIMADE17 ou un organisme analogue. [17] La CIMADE se définit en France comme une association de solidarité active avec les migrants, les réfugiés et les demandeurs d’asile. Elle agit pour le respect des droits et la dignité des personnes.
 
C’est pourquoi nous demandons qu’un dispositif spécifique (numéro vert ; cellule d’accueil ; soutien psychologique ; aide d’urgence) soit mis en place pour faciliter l’accueil des "fuyards" et permettre l’exfiltration de ceux (celles) qui attendent cette opportunité.

C’est à la Conférence des évêques ou à la CORREF18 en France, et à leurs équivalents ailleurs qu’il appartient de mettre en place un dispositif indépendant, une cellule d'urgence, qui sera placé sous leur responsabilité dans un strict respect de la confidentialité. Cette cellule aura également pour tâche de récupérer le cas échéant les documents et/ou effets personnels du démissionnaire. Elle disposera à cet effet d’un mandat particulier et d’une autorité reconnue pour ce type de démarche, évitant ainsi à la victime – qui n’en a pas encore la force – d’affronter ses abuseurs. [18] CORREF : Conférence des Religieux et Religieuses de France regroupe les congrégations du clergé régulier, les ordres religieux et différents Instituts.
 
Si la communauté dont est issue la personne est canoniquement de droit pontifical, il est également du devoir strict de l’évêque du lieu, outre son rôle d’accueil, de servir de relais pour alerter au Vatican les autorités compétentes et en informer l’intéressé(e).
 
Par ailleurs, face aux questions organisationnelles que posent tant de situations, les associations[19] peuvent collaborer pour trouver des solutions de survie et de réinsertion à la personne (associations d’aide au logement, foyers d’hébergement, aide à la recherche d’emploi, assistance juridique…).
[19] Jusqu’à ce jour l’AVREF a trouvé plus de soutien et de compréhension de la part d’associations non confessionnelles que de la part des réseaux catholiques officiels.

Section IV : L’aide à la reconstruction personnelle

Désastre sur les personnes et besoins pour leur reconstruction

Etat des lieux 

Les besoins sont importants de façon massive dans des communautés dites nouvelles ou nouveaux mouvements ecclésiaux et de façon locale plus ponctuelle dans des congrégations traditionnelles.

Globalement le nombre des victimes est impressionnant, malgré le silence encore largement dominant sur ces sujets. Et les victimes se manifestent de plus en plus auprès des associations, alors que jusqu’ici elles pouvaient ne se manifester que sur des forums internet.

D’autre part ces besoins se font sentir dans tous les pays du monde où un membre d’une communauté présente décide de s’enfuir et de s’exfiltrer. Il convient donc de globaliser cette question.
 
Ces besoins d’accompagnement peuvent être de l’ordre du « coup de pouce » pour un recadrage, une remise en route de la personne. Mais ils peuvent aussi être lourds : on ne sait jamais quand finira un accompagnement que l’on entreprend, quand on pourra affirmer qu’une reconstruction personnelle est achevée. Certaines blessures ne guérissent pas et l’accompagnement va donc s’étaler sur plusieurs années.

Dans ces conditions les associations d'aide, qui essaient de se coordonner dans leurs complémentarités, disposent de faibles moyens et ont peine à faire face à la complexité, à l’ampleur, à la globalisation et à la quantité des problèmes posés. Il est nécessaire de dialoguer avec l'instance ecclésiale pour envisager les résolutions humaines dans leur globalité.

Le déni de réalité

Il provient notamment de ceux qui, dans les structures ecclésiales, se sont orientés vers l’aide aux démunis, aux isolés, aux plus faibles. Bénévoles, mais mal informés, ils considèrent à tort que ces victimes sont des apostats qui ont quitté l’Eglise et n’ont pas à être soutenus. Très concrètement, à titre d’exemple, pour une situation dramatique comme celle des ex-Travailleuses Missionnaires, les aides et la compréhension reçues sont venues d’une association comme la CIMADE, non catholique, tandis que les réseaux caritatifs catholiques traditionnels sollicités se sont désintéressés du sujet en restant étrangement silencieux.

De façon générale l’ampleur du problème est largement sous-estimée en raison du silence des victimes face à une autorité à laquelle elles ont été trop longtemps soumises pour pouvoir ensuite aisément l’affronter.

Les mesures à prendre

Au plus haut niveau des « Caritas » internationales et nationales et des structures d’entraide catholiques (St Vincent de Paul, …) une information doit être donnée pour qu’il soit enfin reconnu que des structures d’Eglise, elles aussi, par leur comportement ont abusé de jeunes et d’adultes, ont fait des victimes et en font encore. Les bénévoles de ces réseaux doivent être informés et rendus conscients qu’il n’y a pas que la pédophilie qui crée des situations dramatiques.
 
 Ce fait étant admis, les mouvements caritatifs doivent accepter de recevoir celles et ceux qui sont sortis de communautés et de les aider selon la tradition ecclésiale comme des membres souffrants, et sans les juger, quelle que soit désormais l’attitude de ces victimes vis-à-vis de la religion suite aux abus physiques ou psychologiques qu’on leur a fait subir au nom de l’Eglise. Une formation à l’accompagnement avec explication des mécanismes d’emprise et d’abus de faiblesse doit être dispensée aux membres de ces mouvements d’entraide pour faciliter la compréhension et encourager les bonnes attitudes[20]. Elles ont à considérer qu’il est du premier devoir de l’Eglise de réparer les dommages sur personnes dont elle est elle-même responsable.

[20] Pour bien nous faire comprendre des lecteurs qui seraient peu informés de ces sujets, prenons le cas de la quinzaine de travailleuses missionnaires de la Famille Missionnaire Donum Dei, actuellement exploitées au sanctuaire marial de Lujan en Argentine. Ces femmes sont originaires d’Afrique ou d’Asie. Quand le scandale de leur situation éclatera - et ce sera tôt ou tard - les Argentins choqués par ce qui leur sera révélé et conscients de la dévotion que porte le Pape François à Notre Dame de Lujan essaieront – nous n’en doutons pas - de venir en aide à ces personnes. Mais comment remédier à leur situation quand on sait que le retour dans le pays d’origine est exclu car elles y seraient ostracisées Ce n’est pas l’action de bienfaisance traditionnelle qui pourra résoudre leurs problèmes d’accompagnement, de réinsertion et de reconstruction.C’est toute une chaîne internationale de solidarité qu’il faut anticiper, financer, organiser en respectant chaque situation individuelle. C’est donc une mobilisation à mettre en place entre différentes instances. Ce problème se pose de toutes façons dès qu’une personne a été envoyée hors de son pays d’origine et ainsi coupée de ses racines, ce qui est de plus en plus fréquent.

L’accompagnement spirituel des victimes

Cette instance concerne les anciennes victimes désireuses de retourner à une vie civile laïque. Si certaines d’entre elles souhaitent poursuivre dans une vie religieuse communautaire ou bénéficier d’un accompagnement spirituel, cette question peut également être traitée, mais elle n’est pas du ressort des associations. Il faut considérer comme fondamental pour beaucoup de ces personnes une telle prise en charge par l’Eglise. S'il est de la liberté de la personne de ne plus avoir recours à l'Eglise, il est nécessaire que l'Eglise propose un suivi désintéressé pour aider la personne à se reconstruire sur le plan spirituel.

L’accompagnement personnel psychologique

Parfois cet accompagnement sera de type médical (psychiatrique) et ses frais devront être supportés par la communauté d’origine ainsi que les dépenses pharmaceutiques qui y sont associées pour une longue durée.

Parfois cet accompagnement sera de type psychologique et il faudra s’assurer que le professionnel auquel il sera fait appel est bien informé des phénomènes d’emprise et de dérive sectaire, ce qui n’est pas toujours le cas. Bien sûr aussi, qu’il soit indépendant des mouvements incriminés.

Parfois, enfin, cet accompagnement sera le fait d’un proche ou d’un bénévole qui, s’appuyant sur des principes de bon sens, et attentif à l’écoute, pourra dans une relation de confiance accomplir un travail d’aide très efficace.
 
Il n’y a donc pas de règle absolue, chaque cas individuel devant être considéré comme unique.
 
En complément à l’accompagnement individuel, on ne peut que souhaiter que se mettent en place, comme cela se fait avec l’ICSA[21] aux Etats-Unis, des groupes de parole d’anciens membres de communautés abusives et des ateliers permettant d’échanger et de s’entraider. L’intérêt du travail de groupe est considérable dans la mesure où il permet à la victime de s’évaluer par rapport à d’autres et ainsi de relativiser ce qu’elle considère comme une expérience dégradante unique dont elle ne peut pas parler ou qu’elle ne pourrait pas partager avec d’autres.[22] 
[21] International Cultic Studies Association, la principale association américaine qui s'intéresse aux dérives sectaires ou abus dans les différentes Eglises et dispense des séminaires de reconstruction psychologique personnelle pour les ex-adeptes de cultes abusifs.
[22] Dans ce domaine le remarquable travail d’associations bénévoles comme "c’est à dire" présidée par le Docteur Isabelle CHARTIER-SIBEN doit être soutenu et encouragé, sachant qu’une association de ce type est aujourd’hui complètement surchargée vu l’ampleur du phénomène à traiter.

 
Il arrive souvent qu’une telle personne, même laïque, ait donné partie ou toutes ses années d’activité au service non rémunéré de la communauté. Il convient de réparer ces situations et de ne plus les admettre.

L’accompagnement financier et administratif

Très concrètement la personne qui sort d’une communauté éprouve des besoins financiers pour subvenir à sa survie immédiate. C’est d’ailleurs une des craintes principales qui fait obstacle aux départs. Au moment du départ l’ex-membre de la communauté doit se voir remettre tous ses effets et tous ses papiers personnels. Toutes les attestations nécessaires doivent lui être délivrées pour ses démarches administratives. S’il s’agit d’un laïc, un certificat de travail doit lui être remis conformément aux obligations légales ainsi que les justificatifs demandés par les services publics de l’Emploi. Une somme d’argent décente en espèces doit lui être remise, correspondant au minimum à un mois de RSA. Si la personne ne se trouve pas dans son pays d’origine c’est à la communauté qu’il appartient de prendre en charge les frais de transport et d’hébergement jusqu’à ce que le rapatriement soit effectif.
L'autorité ecclésiale, à travers la cellule d'urgence pré-citée, veillera à ce que la communauté respecte ces obligations.

L’accompagnement dans la recherche d’emploi

Ceci regarde des associations spécialisées, auxquelles on peut adresser les ex-membres.

CONCLUSION

Beaucoup des dispositions que nous préconisons ici relèvent de ce qui est précisé dans le canon 605 : … Les Evêques s'efforceront de discerner les nouveaux dons de vie consacrée confiés par l'Esprit-Saint à l'Eglise : 
« ils en aideront les promoteurs à discerner le mieux possible leurs projets et à les protéger par des statuts appropriés...»

ReCaptcha

Ce service de protection de Google est utilisé pour sécuriser les formulaires Web de notre site Web et nécessaire si vous souhaitez nous contacter. En l'activant, vous acceptez les règles de confidentialité de Google: https://policies.google.com/privacy

Google Analytics

Google Analytics est un service utilisé sur notre site Web qui permet de suivre, de signaler le trafic et de mesurer la manière dont les utilisateurs interagissent avec le contenu de notre site Web afin de l’améliorer et de fournir de meilleurs services.